Le wax waxett de Macky Sall

Macky sall

« Le secret a été gardé jusqu’au bout. Rien n’a fuité », RFI, 16 février 2016. [rires]

De l’employée de maison au riche commerçant, du vendeur de café touba au professeur d’Université, toute la société sénégalaise savait ce qu’allait dire Macky Sall, hier soir, à 20h.

La mémoire courte

Le candidat Sall l’avait promis: « je réduirais le mandat présidentiel à 5 ans ». Elu en 2012, par des citoyens rendus furieux par les dérives autocratiques de « Gorgui » et son fameux »wax waxett », la version sénégalaise de « les promesses électorales n’engagent que ce qui les écoutent », Macky Sall aurait du retenir la leçon: mettre un terme à la gestion clanique de l’Etat, refuser l’inutile bétail politique « transhumant », et, redonner confiance en la parole des institutions pour une question de cette importance. Pourtant élu avec 65% des voix, le Président, par ses pratiques, a choisi de mettre ses pas dans ceux de son ancien mentor, Abdoulaye Wade, chassé sans ménagement par ses compatriotes.

Une communication grossière en deux temps

Voiçi quelques mois déjà, que les griots affamés du Président se répandent dans la presse, enjoignant opportunément « Macky » de « respecter la constitution sénégalaise », qui, à la suite d’un énième charcutage d’Abdoulaye Wade en 2011, fixe la durée du mandat présidentiel à 7 ans, après qu’elle eut été de 5 ans. Magnanime, Sall, après cette préparation médiatique, choisit alors de s’en remettre au Conseil constitutionnel, en lui demandant de dire la durée du mandat présidentiel … inscrite dans la Constitution en vigueur. Gros malin.

Trouver un élément de surprise dans la réponse de ce dernier requiert donc une très grande imagination, même au pays de la Téranga. Sall, s’est donc présenté hier comme un bon élève, modeste et soucieux de respecter la réponse des sages à deux questions qui ne leur ont jamais été posées car elles n’étaient pas de leur ressort: deux questions politiques.

Un calcul politique à la petite semaine

En effet, il aurait été très facile – suivant la constitution elle-même – de poser ces deux vraies questions aux sénégalais, par un référendum : quelle durée de mandat choisissez-vous pour le mandat présidentiel ? Doit-elle s’appliquer au mandat en cours ? Macky Sall avec un peu d’intelligence politique, aurait même pu défendre l’idée de poursuivre son mandat actuel, 7 ans, malgré sa promesse de 2012, si c’est aujourd’hui son point de vue. Les sénégalais auraient tranché, et, quelque soit le résultat, il en aurait tiré un bénéfice politique : avoir posé la question, en cessant cette habitude mortifère de la classe politique sénégalaise, de prendre les sénégalais pour des imbéciles. Se rappeler Wade, encore une fois.

Par ailleurs, politiquement, avec une opposition déchirée, à l’électro-encéphalogramme plat ou autour du bol avec le pouvoir, gagner des élections présidentielles en 2017 n’était pas un pari bien risqué. La principale menace, Khalifa Sall, n’étant pas mûr pour cette échéance, car inconnu hors de la capitale. Sall s’est donc rajouté lui même, deux années qui risquent de lui coûter cher, compte tenu de la perte de confiance qu’il a engendré, d’une jeunesse majoritaire laissée à l’abandon et de nuages menaçants entourant les activités de certains membres de son premier cercle .

Macky Sall, comme la plupart des femmes et hommes politiques de ce pays, semble ne pas avoir compris l’importance du message délivré le 23 juin 2011 par les sénégalais à leur dirigeants. Dans le monde incertain des crises sociales profondes qui traversent l’espace saharo-sahélien, c’est prendre un bien grand risque. Petits effets, grandes conséquences.

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